Tournon d’Agenais : l’EHPAD hors des murs
L’EHPAD Bel-Air de Tournon d’Agenais a été retenu par l’Agence Régionale de Santé (ARS) pour devenir un centre de ressource, une plateforme de soins qui sera ouverte sur l’extérieur.
Lors de la cérémonie des vœux de janvier, le directeur Michel Le Bon de l’Établissement d’Hébergement pour Personnes Âgées Dépendantes (EHPAD) Bel-Air de Tournon d’Agenais a annoncé que sa structure avait été retenue par l’ARS dans le cadre d’un appel à projets « centre de ressource ». « Nous sommes le seul établissement de Nouvelle Aquitaine à avoir été choisi. Cela va nous permettre d’accéder à une enveloppe budgétaire de 300 000€ sur trois ans pour financer un nouveau projet d’EHPAD hors des murs ». Autrement dit de proposer un panel de prestations gérontologiques à l’extérieur de la maison de retraite pour des patients qui ne fréquentent pas déjà l’accueil de jour.
Les thérapies non-médicamenteuses
« L’objectif sur notre territoire, le Tournonnais, est de proposer des soins qui permettront un étayage des personnes à domicile. Nous ne remplacerons pas ce qui existe déjà, mais proposons un complément », précise Michel Le Bon. Mais comment Bel-Air a-t-il retenu l’attention de l’ARS ? Bruno Chauvin, directeur du Pôle de Santé Villeneuvois dont dépend la structure, le résume bien : « Les bons résultats de Bel-Air plaident en sa faveur, ainsi que la dynamique de projet qui anime les équipes ».
L’EHPAD a notamment misé depuis quelques années sur les thérapies non-médicamenteuses qui permettent d’accompagner les résidents dans leur vieillissement plutôt que d’essayer de les en guérir. Ainsi, Bel-Air propose à ses résidents un espace Snoezelen (espace multisensoriel – ndlr), un robot émotionnel, une borne mélo-quizz, de la gym douce adaptée, des bains thérapeutiques, un atelier socio-esthétique, des parcours de marche, de la zoothérapie et de la musicothérapie. Et en 2018, une gare à même vu le jour au sein de la maison de retraite !
Aurélien Lacaze est l’initiateur de cette création. En effet, c’est lui qui a lancé l’idée de mettre en place cette nouvelle thérapie à Tournon en 2017. En pleine Validation des Acquis et des Expériences (VAE) pour préparer un diplôme d’état d’accompagnant éducatif et social, Aurélien cherchait des solutions pour réduire la déambulation des résidents atteints d’Alzheimer : « Ces derniers peuvent parcourir jusqu’à 14 km par jour ce qui induit des risques de dénutrition, de fatigabilité et de chute ».
Un voyage venu d’Italie
Des recherches sur Internet le mène vers Valenciennes, dans le nord de la France, où l’on expérimente une thérapie venue d’Italie, dite du voyage. L’idée est de récréer une gare fictive avec un train virtuel et d’accompagner les patients atteints d’Alzheimer dans leur envie de partir. « La thérapie du voyage répond à cette envie et l’apaise », précise Aurélien. Avec des premiers résultats probants, selon les études italiennes : 30 % de chute en moins et 40 % de médicaments en baisse.
La direction suit Aurélien dans son projet et obtient 50 000€ de financement de l’ARS pour le mettre en place. Les travaux ont lieu en janvier 2018, les intervenants suivent une formation en avril et les premières thérapies démarrent en mai dernier. « Nous sommes encore dans la phase expérimentale avec seulement trois patients qui « partent » deux fois par semaine. Mais l’observation nous montre que la thérapie a une vraie influence sur les résidents », conclut Aurélien.
Rebondissant sur cette dynamique, le maire de la bastide et président du Conseil d’Administration de l’EHPAD, Didier Balsac souhaite aller encore plus loin : « Comme nous le faisons, déjà au sein du Foyer Logement Croix Daniel avec la Maison Saint-Paul pour des personnes en situation de handicap psychiques, nous pourrions créer une structure d’accueil avec des logements individuels, où viendraient s’installer des gens qui peuvent encore garder une certaine autonomie mais qui ont besoin d’une plateforme de services proche. » Michel Le Bon abonde en son sens : « Nous avons besoin de développer des solutions d’habitat intermédiaires où la personne est encore chez elle, afin de lutter contre les réponses non-pertinentes d’hospitalisations ou d’hébergement par défaut en EHPAD. » Un terrain récemment acquis par la municipalité tout près de Bel-Air serait idéal pour ce nouveau projet. Reste encore à réfléchir sur la forme juridique de ce nouvel ensemble, mais l’idée est lancée et semble sur de bons rails !
S.G
L’équithérapie pour le bien-être et l’apaisement
Depuis 11 ans, Nadège Clémenceau, monitrice à l’éperon Livradais, propose des séances de thérapie avec le cheval à destination des enfants en difficulté. Son accueil s’est étendu aux personnes âgées l’année dernière, grâce à un partenariat avec l’Adessadomicile du Grand Villeneuvois.
A l’éperon Livradais, il y a les cavaliers qu’on voit tous les jours et ceux qui sont plus discrets. Tous les 15 jours, Nadège des groupes d’enfants des instituts médico-éducatifs (IME) pour des séances d’équithérapie. Durant une heure, les participants découvrent le centre équestre, approche le cheval, apprennent à le brosser… jusqu’à pouvoir le monter. Comme défini par la société française d’équithérapie, cette approche « n’est pas un traitement direct de maladies somatiques ou de troubles psychomoteurs, mais une intervention touchant à l’esprit, au moral, à la personnalité. L’objectif concerne aussi le mieux-être et le sentiment de confort. » Cette pratique, Nadège l’a découverte lors de sa formation au centre équestre de Sainte-Livrade-sur-Lot, où elle travaille désormais : « Si je ne pouvais faire que ça, je le ferais, confie-t-elle. Même si on ne peut pas en vivre, cela mériterait d’être développé. »
Être acteur de sa santé
Un souhait qui pourrait se réaliser. Depuis un an, le centre équestre échange avec l’Adessadomicile, association d’aide et services à la personne. Passionné d’équitation, son ancien président, Monsieur Traversier a lancé l’idée d’en faire bénéficier les personnes âgées. Un projet aujourd’hui porté par Carine Léonard, directrice de l’association : « L’équithérapie entre pleinement dans l’aide à la personne et au maintien à domicile : elle permet de rompre l’isolement, de stimuler les sens et les capacités, de réveiller des émotions. Cela leur permet d’être acteurs de leur santé. » Reste encore à les convaincre et à leur faire dépasser leurs appréhensions vis à vis du cheval. L’an dernier, seules deux personnes auraient participé à une séance d’équithérapie, prise en charge par l’Adessadomicile et le Conseil départemental pour les personnes bénéficiaires de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) et de la prestation de compensation du handicap (PCH). Nadège se souvient particulièrement de ce monsieur de 75 ans dont le rêve était de monter à cheval : « Nous avons fini la séance autour d’un café. La parole s’est libérée. Il s’est confié sur des souvenirs d’enfance. »
Convaincues des bienfaits de cette approche, Nadège et Carine Léonard espèrent franchir un cap cette année et relancer l’activité dès le printemps, période propice à l’accueil des bénéficiaires.
M.P
Du plaisir et de l’auto-dérision pour un projet photo décalé
A la Résidence du Château à Nérac, les séniors s’apprêtent à revêtir des costumes extravagants ou burlesques pour se faire prendre en photo dans une mise en scène signée Céline Bini.
Céline Bini, l’animatrice de la maison de retraite, a imaginé ce projet « sans limites » pour les résidents : « Ils ont le choix de participer ou non, et le but c’est de s’amuser, d’être décalé sans se prendre au sérieux ! » Mamika, modèle décalé du photographe Sacha Goldberger, et Iris Apfel, égérie de la mode à 90 ans, l’ont inspiré pour le projet, qui suscite l’enthousiasme des modèles en herbe. « Ils ont passé l’âge qu’on leur impose quoi que ce soit ! Alors s’ils ont envie d’une coiffure à l’iroquoise, ils auront une coiffure à
l’iroquoise », précise Céline Bini dans un large sourire plein de tendresse à l’égard de sa troupe, d’une moyenne d’âge de 90 ans.
Une dizaine de résidents sont allés choisir les costumes au Relais du Moulin Neuf à Barbaste, qui les leur met gracieusement à disposition. La séance d’essayage a eu lieu sur place, et la suite se fera chez eux, à Nérac. Le décor pour les séances photos est en cours d’élaboration. Le photographe a été choisi, son matériel réservé. Fin février, tout sera en place pour ce shooting prometteur de joie et de bonne humeur. Une fois les clichés imprimés en grand format, ils seront bien sûr exposés sur place, mais Céline Bini envisage une exposition dans les rues de Nérac au printemps. « On veut faire naître des sourires, on ne veut plus être dans la tristesse des corps qui s’étiolent. Sortir de l’ordinaire, interroger, ne plus voir la vieillesse triste et décadente, mais s’amuser de ce qu’on est, et faire des bêtises », voilà l’objectif affiché par Chantal Barthe, directrice de la Résidence du Château, qui se dit prête à trouver les financements pour ce projet qui lui tient particulièrement à cœur.
Les activités proposées aux séniors regorgent d’inventivité et d’originalité depuis l’arrivée de Céline Bini en avril dernier : pour donner le goût de vivre aux résidents, elle met en place diverses sorties et activités au sein de la résidence. Ils sont 85 au total, plus ou moins dépendants. Selon leurs possibilités, ils participent simplement aux promenades autour de la maison de retraite, aux ateliers créatifs ou aux sorties en calèche ou à la Chèvrerie de Marie à Moncrabeau. Céline Bini met un point d’honneur à créer des échanges entre la maison de retraite et le reste du monde, comme pour amener un vent de fraîcheur dans un milieu trop souvent refermé sur lui-même.
C.L