Mis en place dès sa création en 2010 sur le département, le dispositif de service civique a déjà concerné plus de 2 000 jeunes. Le service « Jeunesse, sports et vie associative » de la direction départementale de la cohésion sociale et de la protection des populations (DDCSPP) a pour mission de développer et promouvoir ce dispositif auprès des jeunes.
De 2010 à 2017, le département a compté 1 535 volontaires en service civique. « Le dispositif a connu un boom en 2015, explique Marion Berneron, conseillère pédagogique au service « Jeunesse, sports et vie associative », responsable du pôle d’engagement des jeunes. L’année a été marquée par les attentats et un fort besoin de cohésion sociale qui s’est traduit par un engagement plus important des jeunes dans la société. » Une tendance qui s’est confirmée entre 2016 et 2017 avec + 29 % de nouveaux volontaires.
Pour l’année 2018, si les chiffres se sont pas encore consolidés, la DDCSPP recense plus de 700 jeunes en mission, dont 450 d’entre eux ont signé un contrat d’engagement au 1er janvier 2018. « La particularité de ce dispositif est qu’il est lié au calendrier scolaire. 70 % des missions commencent partir de septembre. Cela concerne les jeunes qui n’ont pas trouvé leur voie après le lycée. Puis il y a un second cycle de signatures en janvier, avec des jeunes qui se rendent comptent que la filière choisie ne leur correspond pas. »
Marion Berneron tient à rappeler que le seul critère d’accès au service civique est d’avoir entre 16 et 25 ans (30 ans pour les personnes en situation de handicap). « Les missions sont diversifiées, sans critère de compétences et il n’y a pas d’activité genrée. Ce qui rend le dispositif équitable. En Lot-et-Garonne, 51 % des services civiques sont des garçons, 49 % des filles. »
La moitié des missions concernent le domaine sportif ou solidaire (25 % et 25%). Viennent ensuite l’éducation pour tous (19 %), la culture et les loisirs (13 %), la mémoire et la citoyenneté (9 %), l’environnement (9 %) et la santé (4 %). Au total, plus de 200 organismes d’accueil ont été agréés par la DDCSPP depuis la création du dispositif, dont 75 % d’associations. « L’objectif est de permettre à de plus en plus de jeunes d’y avoir accès, tout en garantissant la qualité de l’expérience. Il n’est pas question de faire du service civique pour faire du service civique et de tomber dans des objectifs chiffrés », insiste la conseillère.
Actuellement, il n’existe pas de système précis de suivi des jeunes passés par un service civique. « Beaucoup reprennent une formation, certains sont embauchés dans la structure d’accueil. D’autres cherchent à prolonger l’expérience avec un service volontaire européen, développe la responsable du pôle jeunesse. Dans tous les cas, si le service civique a été un tremplin, c’est une réussite. Chaque jeune construit son propre parcours. »
« Ils arrivent en ado et repartent en jeunes adultes »
Depuis 2015, la commune de Sainte-Livrade-sur-Lot et une dizaine d’associations ont intégré dans leurs rangs près de 60 jeunes avec une mission de service civique. Encadrées et suivies par le Bureau Information Jeunesse (BIJ), quatre jeunes femmes sont actuellement en mission dans les services communaux.
Elles ont entre 19 et 21 ans, ont parfois enchaîné les petits boulots faute d’avoir encore trouvé leur voie. Elles ont cependant un point commun : l’envie de travailler.
Depuis le 1er octobre, Marina et Sarah, ont intégré les services techniques de la mairie pour une mission de sensibilisation au tri sélectif. « Nous sommes en train de réaliser des flyers pour les habitants et des interventions auprès des écoles », explique timidement Sarah, qui n’avait jusqu’alors réalisé que des missions d’intérim en usine. Plus extravertie, Marina, a elle « saisi l’opportunité du service civique pour ne pas rester sans rien faire », après deux mois de remplacement dans une société de service à domicile. « La mission locale et mes parents m’en avait déjà parlé. Je ne pensais pas que ça me plairait. Mais j’ai besoin d’argent à la fin du mois », avoue-t-elle franchement. Et finalement l’expérience s’avère déjà plutôt positive : « J’ai appris plein de choses et je peux vous dire que ne jette plus mes mégots partout, rigole la jeune femme. Et surtout je me sens utile. »
Un tremplin vers le monde du travail
De quoi ravir Marjorie Duc, coordinatrice du dispositif service civique au Bureau Information Jeunesse : « Beaucoup arrivent sans grande expérience. Ils rentrent en ado et repartent en jeunes adultes. » Les huit mois de mission permettent à ces jeunes de prendre en confiance en eux, d’acquérir de nouvelles compétences et d’envisager une reprise d’études ou une entrée dans la vie active. C’est le cas de Sabrina, en mission d’accueil et de soutien aux actions du BIJ : « J’ai un bac soins et services à la personne. Mais je voudrais me réorienter dans la communication ou l’événementiel. Les compétences que je suis en train d’acquérir pour l’organisation du job dating par exemple devraient me permettre de reprendre des études dans ce domaine. » S’il est difficile de suivre la soixantaine de jeunes passés en service civique, Marjorie Duc souligne que beaucoup ont repris des études et sont aujourd’hui dans le monde du travail, avec de belles réussites : « Notre premier service civique est aujourd’hui éducateur spécialisé, un autre a eu la chance de voir un poste se libérer en mairie à la fin de sa mission et un autre est en contrat au zoo de la Teste de Buch. »
Gladys, dont la mission au service communication de la mairie prend fin au 31 janvier a de son côté quelques regrets : « Je n’ai presque pas travaillé sur la mission pour laquelle j’avais postulé. Je me suis substituée à d’autres postes, avec parfois la sensation de remplacer un salarié. » Des aspects sur lesquels le BIJ veille : « Ils ne sont pas là pour remplacer un employé. Il faut que chaque tuteur joue son rôle et soit garant du respect de la mission. » La jeune femme en gardera pour autant un bon souvenir et espère pouvoir reprendre des études dans le domaine animalier « et pourquoi pas y ajouter les compétences en graphisme et communication acquises. »
Albret Communauté : des offres difficiles à pourvoir
Selon les chiffres de la DDCSPP, les jeunes sur l’arrondissement de Nérac ne représentent que 4 % des services civiques du département.
Amandine Rivière a rejoint en octobre dernier la Maison de Services au Public (MSAP) de l’Albret. La jeune femme de 20 ans était déjà venue dans la structure pour un stage dans le cadre de son BTS assistant manager. Une expérience qui a tout changé, puisqu’elle envisage une réorientation dans le domaine social. Un projet professionnel testé depuis quelques mois grâce à une mission de service civique : Amandine accompagne les usagers de la MSAP dans leurs démarches en ligne et la mise en œuvre d’ateliers. Un rôle en appui de l’accompagnement réalisé par les professionnels de la MSAP.
Amandine est un cas plutôt rare sur Albret Communauté. En effet, l’arrondissement de Nérac ne concentre que 4% des jeunes en service civique du département. Selon Adeline Saint-Germain, conseillère à la Mission Locale de Nérac, l’offre serait plus importante que la demande : « Sur 10 missions proposées via la Mission Locale, seules 6 ont été pourvues en 2018 », majoritairement dans le sport et l’action sociale. « Le service civique sert trois profils, poursuit la conseillère. Il y a ceux qui sont en transition pour trouver leur voie comme Amandine, ou qui préparent un concours dans le social et pour qui le service civique est une première expérience et le moyen de se faire un réseau. Ou encore les jeunes que l’on orientent vers une mission car on voit que leur projet ne peut pas prendre forme dans l’immédiat. » Amandine, elle, porte un autre regard sur le dispositif : « Avant mon stage durant lequel j’ai travaillé sur les demandes d’agréments, je ne savais pas du tout ce qu’était le service civique. J’avais déjà vu les pubs mais je ne savais pas pour quoi c’était fait. Même autour de moi, mes amis ne savent pas ce que c’est. Et puis, il y a le problème de la rémunération. » Pour Marion Berneron, en charge du pôle jeunesse au service jeunesse, sports et vie associative du département, rattachée à la DDCSPP, Albret Communauté fait également face à une autre problématique : la mobilité. « C’est un territoire diffus et isolé. Les structures sont hyper motivées mais les jeunes n’ont pas forcément les moyens de se rendre sur le lieu des missions et donc elles restent vacantes. » Une problématique à laquelle le service dit réfléchir pour « plus d’équité sur le département ».
Marina Paris